
La population vieillissante est en forte augmentation ; on sait que cette population est sujette à une prise importante de médicaments : d’après une récente étude américaine, 25,1% et 45,6% des patients âgés respectivement de 65-69 ans et 70-79 ans prennent au moins 5 médicaments. Cette prise de médicaments peut se gréver de difficultés particulières à cette population : défaut d’observance, particularités physiologiques nécessitant une adaptation de dose, difficultés pour avaler/déglutir (prévalence de 14, 7% jusque 68% en institution), survenue d’effets indésirables spécifiques, …
Une récente revue de la littérature a évalué les formes alternatives permettant d’améliorer et faciliter les modalités d’administration chez la personne âgée : comprimés orodispersibles, administration nasale, via les poumons, ou à travers la peau (transdermique).
Concernant les comprimés orodispersibles (qui fondent facilement et rapidement une fois dans la bouche, ils sont déjà disponibles pour le traitement de maladies de type douleur, dépression, maladie de Parkinson ou d’Alzheimer. Il a été montré que des patients atteints de dysphagie, de maladie de Parkinson ou de dépression préféraient ces formes qui fondent dans la bouche, plutôt que des formes solides traditionnelles. Des problèmes spécifiques liées à la fabrication de ces médicaments existent cependant : gout désagréable à masquer, incorporation de grandes quantités d’actifs ou de principe actif non soluble, balance entre force mécanique et vitesse rapide de désagrégation. L’impact particulier de la xérostomie (bouche sèche), concernant 1 patient âgé sur 5, sur l’admiistration de ces médicaments est encore mal connu. il est donc bien nécessaire de prendre un verre d’eau associée à la prise de ces médicaments.
Concernant les médicaments administrés par voie pulmonaire, cela peut avoir un intérêt de fait de l’absence de premier passage hépatique, de faible activité enzymatique, et de possibilité technologique à accéder aux alvéoles et donc potentiellement à la circulation sanguine, même pour des molécules de haut poids moléculaire. il existe des médicaments tels que des antibiotiques devant agir au niveau pulmonaire, la levodopa, certains médicaments dans l’hypertension artérielle (nisoldipine), ou encore l’insuline (sur des sphères), déjà développés via cette voie d’administration. Cependant lors du développement clinique de ces médicaments, l’évaluation chez le sujet âgé est rare et l’on sait que les capacités fonctionnelles du poumon ont tendance à se réduire au fil du temps. Par ailleurs, ces médicaments sont souvent administrés sous forme d’inhalateurs. Or chez le sujet âgé il a été montré une association forte entre des difficultés d’utilisation de dispositifs d’inhalation et l’âge avancé, car ces dispositifs sont souvent complexes à employer (force à appuyer, informations de prise difficiles à lire et à ressentir, …). Dans ce cadre il est nécessaire de correctement former les utilisateurs, en leur prodiguant des conseils/démonstration et en vérifiant leur capacité d’utilisation.
Concernant les médicaments administrés par voie nasale, cela peut avoir un intérêt de fait de l’absence de premier passage hépatique et de la haute vascularisation (passage rapide du principe actif dans le sang) notamment pour les principes actifs lipophiles de petite taille (fentanyl ou propranolol). Pour les médicaments hydrophiles et les peptides, le système mucociliaire empêche spécifiquement l’adhésion et donc l’absorption dans la circulation. l’utilsiation de substances adhérentes ou d’inhibiteurs enzymatiques peut pallier ces difficultés. Ainsi l’utilisation de teriparatide, associé au système breveté CriticalSorb° est actuellement en développement clinique dans le traitement de l’ostéoporose.
L’intérêt majeur d’administrer le médicament par la voie nasale est aussi la capacité à atteindre le cerveau rapidement, directement par les neurones olfactifs, les cellules épithéliales ou les nerfs du trijumeau ou indirectement. cela a été montré pour le donepezil, employé dans la maladie d’Alzeimher, sous forme de nanosuspension, ou la tacrine couplé à un polymère thermosensible susceptible de gélifier in situ.
La sécheresse nasale ou la rhinite plus fréquentes chez le sujet âgé, sont cependant susceptibles d’impacter l’efficacité du médicament administré par cette voie.
Concernant les médicaments administrés à travers la peau (patchs, voie transdermique), cela peut avoir un intérêt pour améliorer l’observance, réduire les effets indésirables (en procurant des taux plasmatiques plus constants), réduire les doses administrés notamment pour les médicaments fortement dégradés lors du premier passage hépatique.
Cependant tous les principes actifs ne peuvent être employés pour être mis sous cette forme ; les bons candidats sont ceux de bas poids moléculaire, lipophilie/hydrophilie avec logP autour de 2, bas point de fusion et puissance pharmacologique. Ajouter des excipients améliorant la pénétration permet d’envisager cette forme pour l’ondansetron, la fluoxetine ou la risperidone. Des formes patchs sont déjà commercialisées, dont certaines chez le sujet âgé : exelon° (rivastigmine, maladie alzeimher), neupro° (rotigotine dans la maladie de Parkinson), douleur, angine de poitrine, hormones, …
Il a été montré que la prise de patch d’exelon améliore l’observance comparativement à des formes orales, lors de suivis de cohorte de 6 mois.
L’avenir de ces formes transdermiques se trouve dans l’iontophorèse ou dans les systèmes de micro-effraction cutanée (microaiguilles).
Cependant chez le sujet âgé ces patchs peuvent induire des effets indésirables locaux, dont des irritations, au niveau de la zone de pose. Il n y a pourtant pas de différence de diffusion passive entre la peau d’un sujet jeune et âgé, malgré des différences physiologiques de peau.
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