Preparations hospitalieres et magistrales

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EuPFI 2022 (14è édition) : développement du moxidectine chez l’enfant dans les maladies tropicales négligées — 21 septembre 2022

EuPFI 2022 (14è édition) : développement du moxidectine chez l’enfant dans les maladies tropicales négligées

Photo de Git Stephen Gitau sur Pexels.com

Hannah Batchelor, professeur au Strathclyde Institute of Pharmacy and Biomedical Sciences à Glasgow (UK) a présenté la démarche de développement d’une formulation pédiatrique de moxidectine, un anti-parasitaire, utile dans un certain nombre de maladies tropicales négligées.

La démarche a été entreprise avec le soutien du Medicines development in global health.

A ce jour il existe une spécialité de Moxidectine 2 mg en comprimé non pelliculé.

Ce médicament est indiqué selon la FDA pour le traitement de l’onchocercose chez l’adulte et l’enfant de plus de 12 ans, à la dose de 8 mg par jour.

L’onchocercose concerne en Afrique 218 millions de personnes à risque. La fourniture de l’ivermectine avec administration de masse est actuellement l’une des principales stratégies mises en œuvre pour éliminer l’onchocercose.

Or, pour conduire à l’éradication et diminuer les réservoirs en Afrique, il est nécessaire de traiter également les enfants. 

La moxidectine, potentiellement plus efficace que l’ivermectine, pourrait, dans ce cadre, être utile chez l’enfant, avec la nécessité de développer une formulation pédiatrique. Elle présente aussi l’intérêt aussi dans les filarioses et pour des maladies vétérinaires liées à des ectoparasites.

Le projet MINIMOX correspond à ce développement ; il a été permis grâce à des fonds européens de 2020.

De nombreux points doivent être pris en compte pour le développement d’une forme adaptée de cette molécule. Des contraintes de stabilité en zone tropical, l’évitement de forme liquide et de la nécessité de ne pas employer de dispositif d’administration ; une flexibilité dans les doses qui doit être comprise entre 2 et 36 mg, pour un médicament adapté idéalement entre 1 et 4 ans.

La molécule est peu soluble dans l’eau, photosensible, a un faible écoulement, une faible densité apparente et colle aux surfaces.

Un projet en parallèle a évalué auprès des populations locales les attendus pour de tels traitements (EDCTP project).

Des comprimés de 4 ou 8 mg ont été développés, obtenus par compression directe. Leur profil biopharmaceutique a été évalué, par des profils de dissolution et avec une désintégration plus rapide que la forme adulte à 2 mg ; les premiers éléments retrouvent une instabilité liée à l’humidité, avec potentiellement l’ajout de dessicant. La stabilité des médicaments a été évaluée dans un flacon pilulier, ouvert quelques jours.

Suite du projet consiste en le scale up (changement d’échelle de production), la production (« manufacturing ») et la réalisation d’un DME, avant le démarrage d’un essai clinique.

Parution de la nouvelle version des Bonnes Pratiques de Préparation ! —

Parution de la nouvelle version des Bonnes Pratiques de Préparation !

Les bonnes pratiques de préparation (BPP) sont le référentiel opposable employé par les pharmaciens en officine et à l’hopital afin de garantir la qualité de leurs préparations pharmaceutiques.

Cette nouvelle version, disponible sur le site de l’ANSM, actualise celle de 2007 et a été élaborée par un Comité spécialisé scientifique temporaire (CSST) créé en 2016, notamment suite aux conclusions de l’IGAS sur des cas de contaminations survenues chez des nouveaux nés ayant reçu des préparations individualisées de nutrition parentérale. Ce CSST incluait des pharmaciens hospitaliers, officinaux, inspecteurs et universitaires, ainsi qu’à partir des propositions formulées lors de plusieurs consultations publiques. Elle devait également prendre en compte les évolutions scientifiques et réglementaires (étiquetage, …) depuis les précédentes BPP de 2007.

Cette nouvelle version est applicable à partir du 20/09/2023. D’ici là, la version des BPP de 2007 est celle qui s’applique.

On retrouve dans cette nouvelle version les nouvelles règles des bonnes pratiques organisées en 9 chapitres généraux, des annexes et deux lignes directrices (LD1 : Préparations de médicaments stériles et LD2 : Préparations de médicaments contenant des substances pouvant présenter un risque pour la santé et l’environnement), ainsi qu’un glossaire.

Deux autres lignes directrices (qui ont été soumises en enquête publique) devraient être rendues disponibles prochainement :

  • LD3, sur les Préparations rendues nécessaires par les recherches impliquant la personne humaine, y compris préparations de médicaments expérimentaux et
  • LD4, sur les Préparations de médicaments radiopharmaceutiques.

Par rapport à la précédente version de 2007, l’ANSM indique que :

« Cette version actualisée prévoit :

  • l’amélioration des démarches d’analyse de risque, grâce à différentes annexes pédagogiques ainsi qu’une approche pour aider à étudier la pertinence et la faisabilité technique de la préparation ; pour ce faire, un modèle de dossier de préparation est mis à disposition ;
  • l’élargissement des contrôles, y compris via de la sous-traitance, en lien avec les préconisations du rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) sur l’évaluation des pratiques en matière de nutrition parentérale pédiatrique de janvier 2015. Des recommandations sont ainsi formulées concernant les tests à effectuer et leur fréquence ;
  • le renforcement de la formation des opérateurs, avec notamment des exemples de fréquence des formations (en particulier concernant la préparation de médicaments stériles) ;
  • une modification des quantités maximales produites par lot, qui correspondront désormais à un nombre maximal de patients potentiellement traités par la préparation réalisée. »
Publication annexe 1 des GMP (BPF) portant sur la fabrication des médicaments stériles — 8 septembre 2022
Acétate de sodium à la place du chlorure de sodium en nutrition parentérale, chez les prématurés ? — 7 septembre 2022

Acétate de sodium à la place du chlorure de sodium en nutrition parentérale, chez les prématurés ?

Les reins des grands prématurés sont encore en cours de maturation à la naissance. Cela entraine des risques de déséquilibres électrolytiques lors des premières semaines de vie. La nutrition parentérale parfois mise en œuvre vient pallier le manque engendré par le défaut de réabsorption et d’excrétion des reins des nouveaux nés. Parmi les ions apportés par la NP, on retrouve notamment le sodium, le potassium, le calcium, le magnésium, le phosphate.

Le chlorure de sodium (NaCl) est l’une des sources d’apport en sodium dans les poches de NP. En plus des ions sodium, il apporte des ions chlorures. L’immaturité des tubules rénaux majore le risque d’accumulation des ions chlorures, conduisant à terme à un risque d’acidose métabolique hyperchlorémique.

Les recommandations de l’ESPGHAN de 2018, basées sur une littérature ancienne, préconisent dans ce contexte de remplacer l’apport sodique par un autre sel, du type lactate de sodium ou acétate de sodium (AS) pour réduire le risque de survenue d’acidose métabolique hyperchlorémique.

Il y a peu d’études dans la littérature qui s’intéressent à l’impact de la source d’apport en sodium pour la nutrition parentérale sur la survenue de l’acidose métabolique. Ali et al ont publié un article en 2020 dans le journal de la société coréenne de gastroentérologie pédiatrique, qui compare l’utilisation de NaCl versus AS sur la survenue d’acidose métabolique chez des prématurés (âge gestationnel <33 semaines) dans un hôpital universitaire Malaisien.

Les auteurs ont mis en place un essai mono centrique prospectif contrôlé randomisé en double aveugle, incluant 26 nouveaux nés dans chaque bras (NaCl et AS). Les critères de jugement principaux étaient le dosage du pH et de l’excès de base ; les critères de jugement secondaires étaient la survenue de comorbidités (dysplasie broncho-pulmonaire, hémorragie intraventriculaire, entérocolite nécrosante…). Les auteurs n’ont pas mis en évidence de différence statistiquement significative sur le pH ou l’excès de base sur les 6 premiers jours de NP des enfants (p = 0,11 et p = 0.13 respectivement). Un décès était relevé dans chaque bras. L’utilisation de NaCl n’entrainait pas non plus de sur risque de morbidité, à l’exception de la dysplasie broncho-pulmonaire plus fréquente sous NaCl (p = 0.01). Dans la prise en charge, les enfants dans le groupe NaCl ont reçu davantage de supplémentation par bicarbonate de sodium.

Cette étude ne montre pas de réduction significative de survenue d’acidose métabolique hyperchlorémique sous AS versus NaCl sur les 6 premiers jours de NP, en revanche les courbes du pH et de l’excès de base divergent entre J4 et J6 (p <0.05). Par ailleurs, les auteurs n’ont pas précisé si les enfants avaient des apports de chlore en dehors de la NP (médicaments injectables…), sachant aussi que potentiellement les acides aminés et le chlorure de potassium sont également susceptibles d’apporter du chlore. Enfin les auteurs n’ont pas étudié la chlorémie des nouveaux nés.  

Dans le but de suivre les recommandations européennes, il serait intéressant de réfléchir à moduler l’utilisation du NaCl. Actuellement, l’acétate de sodium n’est pas disponible sur le marché français, seul le lactate de sodium en flacon verre est disponible, auprès de l’AGEPS. Des données cliniques sont encore manquantes afin de définir le recours au lactate (ou autre) à certaines populations à risque?